jeudi 19 mai 2011

I don't know why you say Goodbye, I say Hello !?




Allo,
Comment vas-tu? Comment va tout le monde?

De mon côté, le retour est doux-amer...une minute c'est cool, l'autre je me demande pourquoi je suis ici, où est-ce que je suis atterri. C'est bizarre, mais normal j'imagine. Je suis de retour, sans vraiment comprendre qu’est-ce qui se passe. Je me sentais comme ça la dernière semaine de mon séjour, tu te rappelles?

Dire au revoir aux gens qu’on aime ce n’est jamais facile, mais te dire au revoir à toi, à la vie que j’adorais, à un milieu qui me stimulait, ça me semble impossible pour l’instant. C’est comme si je n’avais pas fermé la porte réellement.

Je reprends tranquillement possession de mon appartement qui est toujours aussi beau et soudainement immense (comparativement à mon studio d’Opal 4), mais il ne sent pas moi, il ne me ressemble plus tout à fait. Ça viendra.

J’ai revu les amis, un à la fois et en bande, mais à chaque fois j’ai une bizarre impression de ne pas avoir quitté Montréal, que rien n’a changé sauf moi. Comme si nous continuons une conversation laissée en plan il y a cinq mois.

Et j’ai peur, je te l’avoue. J’ai peur de revenir rapidement à la vie que j’avais avant et je n’en ai pas envie. Peur d’avoir rêvé ces cinq mois de bonheur, d’avoir perdu ce qui faisait que j’aimais ma vie montréalaise. Comme je t’ai apprivoisé, j’aurai probablement besoin de me laisser le temps de réapprivoiser ma ville et ma vie.

Cependant, je suis heureuse d’une chose. De retrouver ma famille, mon frère et mes amis. Je suis contente de pouvoir les prendre dans mes bras et de pouvoir prendre le temps de les écouter et de rire avec eux. Tu en as rencontré quelques-uns, mais les autres te plairaient aussi. Je vais probablement leur tomber sur les nerfs à force de parler de toi et de mon expérience, mais bon, ils devront s’y faire. Oui, parce qu’ils devront comprendre que tu feras à jamais partie de moi.

Je m’ennuie déjà de tes rues, de tes gens, de tes odeurs, de ton histoire et de ta culture. La manière dont tu m’as accueillie quand je suis arrivée et la protection que tu m’as offerte tout au long de mon séjour m’a permis d’éclore et de partir à l’aventure. Merci!


Je te disais « Goodbye » lundi et tu me disais « Hello ». Je n’y comprenais rien. Mais là, je saisis ton message. C’est impossible de se quitter, tu es dans mon cœur, dans ma tête, dans mon anglais, dans mes recherches, dans ma maturité et dans mon monde, pour toujours.


Indeed, I’ll always think of you as this place where I can land and feel like home. This lovely place where the streets’ name sound familiar and the city noises scream my name. You’ll always be the deep risks and wild adventures, the great pleasures, the tremendous beauty, the creative boroughs and the exciting life I once lived. I will miss you, but I’ll come back to you… I understand now that you already knew that a while ago. Instead of saying goodbye, shall we simply say, see you later!

dimanche 15 mai 2011

In the field with Sherlock Holmes

Dans ma discipline, l’important pour un doctorant c’est de trouver un bon « puzzle ». Quand on met le doigt sur un bon problème et que l’on arrive à formuler notre question de recherche, on est sur la bonne voie. Ça tombait bien parce que j’aime les casse-tête. Depuis toute petite j’adore me plonger des heures durant dans ces images déconstruites afin d’arriver plusieurs jours plus tard à voir le résultat final. La différence entre une recherche académique et un casse-tête, c’est que nous n’avons pas l’image sur la boîte pour nous guider, on a seulement des pistes par-ci par-là qu’il faut débusquer, puis suivre tranquillement jusqu’à la ligne d’arrivée. On se change tous un peu en détectives et dans mon cas, Londres oblige, j’ai dû devenir pendant les derniers mois, une copie féminine de Sherlock Holmes.

On nous appelle souvent des rats de bibliothèque, nous les chercheurs en sciences sociales et il ne faut pas se leurrer, dans l'imaginaire collectif on est considéré comme des solitaires dans leur tour d'ivoire, entourés de livres quasi enchaînés à nos ordinateurs. La réalité est tout autre... ou du moins elle est beaucoup plus complexe pour plusieurs d’entre nous. La science, c'est aussi une affaire d'idées et de créativité qui dépend beaucoup de notre personnalité, de nos expériences personnelles. Ce qui fait partie de plus en plus de notre travail et qui n’a rien à voir avec cette image de penseur fumant la pipe dans son grand bureau, c’est l’enquête de terrain, la recherche empirique comme on l’appelle dans le jargon.

Même entre les disciplines, on critique la pertinence du travail de l'autre...
Pour moi, un bon chercheur, c'est un curieux. En grande partie parce que je crois que les gens comme moi qui partent sur le terrain poser des questions, fouiller les archives, ne se satisfont jamais des explications superficielles souvent préconçues que l’on trouve dans les journaux (plusieurs journalistes font un excellent travail, mais heure de tombée oblige, ils ne peuvent jamais fouiller en détail une histoire) ou pire, dans les discussions de coin de table. Un bon chercheur essaie toujours d'en apprendre davantage. C’est presque obsessif des fois, car il est impossible d’arriver à être satisfait d’une réponse sans que notre recherche devienne une passion, une fascination.

Cette semaine, dernière semaine de la portion anglaise de ma recherche de terrain, j’avais une dernière présentation à faire. Les membres de BIOS qui travaillent sur les enjeux de procréation assistée se sont rassemblés à deux reprises dans les dernières semaines pour discuter de nos travaux en cours. Notre petit groupe de cinq s’est donc rencontrés une dernière fois mercredi pour discuter un papier que j’ai écrit pendant mon séjour ici – probablement une partie de mon premier chapitre de thèse – ainsi que le travail d’une autre collègue, Michal.

À la fin d’une très sérieuse discussion, voyant que nous allions boucler incessamment notre rencontre, je me suis confié à mes quatre collègues beaucoup plus expérimentées que moi sur ma jalousie profonde envers la possibilité qu’ils ont de s’intégrer à leur recherche, de parler de leur rôle quand ils écrivent. Je leur disais combien je trouve difficile, après de multiples entrevues souvent très denses en émotions et en contenu, de faire abstraction de ma propre réaction à mes découvertes et d’écrire dans un langage détaché que quelques-uns appellent « scientifique ». S’en est suivi une discussion sur le rapport entre le chercheur et son objet de recherche ainsi que sur la place de plus en plus grande accordée au chercheur dans le travail des sociologues et des anthropologues. Forcée de me rendre compte que ma discipline n’est pas encore rendue là, j’ai parlé de mon désir (si j’avais au moins le temps) d’écrire un genre de journal de bord de mes réflexions, qui n’ont rien d’académique, mais qui ne sont pas moins présentes et très prenantes. Ce serait une façon pour moi de me libérer de toutes ces questions qui restent sans réponse, tous ces bouleversements personnels qui viennent avec ma recherche, toutes les réactions que j’ai suscitées et eues moi-même.
C’est là que Michal m’a dit:  « After my own experience, I came to think that It's not you that do research, it's research that does you! » Et j’ai allumé soudainement sur l’impossibilité de faire du terrain sans s’impliquer dans son terrain. Que mes réflexions de thèse changent la femme que je suis. Les rencontres que je fais me touchent, me bousculent.

Enquêter c’est se mettre en danger, c’est prendre le risque que ce que l’on va trouver ne soit pas ce que l’on pensait. C’est se soumettre à l’opinion des autres et être en proie à devoir changer d’idée, modifier le plan de travail, la structure de la thèse, ses arguments…. Mais bien au-delà de ça, sa propre vision du monde et des choses.

Il n’y a pas si longtemps, les chercheurs étaient, pour la plupart, sédentaires : ils ne pratiquaient pas l'enquête de terrain. Maintenant, il est de plus en plus commun de voir les chercheurs en sciences sociales partir interviewer des gens, observer des milieux et fouiller les archives. Mais je comprends après l’avoir fait pourquoi certains collègues restent froids à l’idée de faire des recherches empiriques : c’est épeurant ! Il faut les couilles d’accepter que notre doctorat prendra peut-être plus de temps à compléter que celui de nos collègues, que le travail sera plus long, ardu et beaucoup moins prévisible. C’est un peu comme un saut dans le vide.

Avant de se lancer sur le terrain, on se prépare en effectuant un recueil de données connues de façon à brosser un premier tableau de son terrain et à mieux envisager sa méthode pour attaquer la recherche. Mais la plupart du temps, on arrive quand même sur le terrain vierge de toute connaissance réelle de ce que l’on va vivre comme expérience. Les « control freak » comme moi vont paniquer quand ils n’arriveront pas à avoir accès aux gens qu’ils veulent rencontrer. Les chercheurs trop organisés seront frustrés de la désorganisation si fréquente des archives et des bibliothèques. Les chercheurs trop sûrs d’eux seront déstabilisés par des découvertes réfutant leurs hypothèses de départ. Etc.

Ensuite, durant l'enquête, on doit poser les bonnes questions, avoir un langage adapté à son interlocuteur. Mais, croyez-moi, ça prend du temps pour y arriver. Il faut se faire une place, rendre les gens assez à l’aise pour qu’ils aient confiance, leur montrer assez de compétence pour qu’ils s’ouvrent sans leur dire tout ce que vous savez pour qu’il aille où les autres ne sont pas allés. C’est une entreprise de séduction, mais surtout ça nous demande de constamment apprendre, de toujours mettre son ego de côté. Pas toujours facile après toutes ces années de travail sur le même sujet.

On doit aussi gérer toutes les informations qu'on reçoit en étant organisé, en tenant à jour un carnet où on répertorie toute l'évolution de notre enquête, en utilisant des enregistrements et ayant recours à notre mémoire. Alléluia ! Ici encore, ma mémoire m’aura sauvée de bien des soucis.

Pour être honnête, c’est presque aussi long faire le débriefing d’une entrevue que de la préparer et l’effectuer. Il faut réécouter les enregistrements, réécrire nos notes pour y ajouter les détails qu’on pourrait avoir oubliés quelques mois plus tard, écrire toutes ses observations du non verbal qui agrémentent ces entretiens et étoffent les analyses. Pour ce qui est des documents d’archives, il faut les classer afin de les retrouver facilement quand il sera temps de faire l’analyse et d’écrire la thèse. Il faut entrer les références dans EndNote (un logiciel de traitement des références bibliographiques) pour s’éviter tout ce travail quand on sera en pleine rédaction et aussi pour échapper aux erreurs de bibliographie.

Aussi, la durée est une condition importante de réussite d'une enquête de terrain. Le mois que j’ai ajouté à mon séjour de départ a été plus productif que les trois premiers où j’étais ici. Cependant, les trois premiers mois étaient essentiels à ce que les six dernières semaines soient aussi prolifiques. Mais, outre garantir une étude de qualité, cela conduit à des sacrifices : de longs mois aux horaires de travail assez intenses, des ressources déjà limitées qu’il faut étirer au maximum et du temps que l’on ne consacre pas à d’autres projets d’article ou tout simplement à la rédaction de la thèse comme telle.

On devra ensuite faire des choix, parfois déchirants, concernant la rédaction finale de notre enquête. Comme c’est mon cas présentement, j’ai trop de données pour la thèse, je devrai donc choisir ce qui est pertinent d’y discuter et ce que je dois garder pour des articles ou mon projet de postdoc. C’est un beau problème, je vous le concède, mais c’est quand même une charge de travail de structuration et d’analyse que mes collègues qui travaillent avec des données quantitatives n’ont pas à gérer.

Malgré tout ça, je ne ferais pas ma thèse autrement. Je pense que les études empiriques sont les seules études qui portent sur la société qui ont une valeur au-delà des murs de nos universités. Ne serait-ce que sur moi-même, le terrain a eu une grande influence. De un, mon enquête m’a permis de me donner la confiance en moi qu’il me fallait pour assumer la valeur de mon travail, revendiquer la place de mon analyse dans le débat qui est déjà en marche. Je me suis rendue compte que personne avant moi n’est allé sur les traces de mon problème et n’a construit la réponse comme je le ferai dans les prochains moi.

De deux, mon enquête m’a permis de me réconcilier avec mon travail, ma discipline. L’année dernière je ressentais une certaine frustration par rapport aux conceptions que les autres avaient de mon travail (celles dont je vous parlais plus haut). Comme si je n’arrivais pas à parler avec assez d’amour de mon travail de chercheure pour convaincre les gens autour de moi de la valeur de mes recherches, de l’apport de ma thèse à la société ou tout de moins à certains débats fondamentaux. Le terrain m’a permis de définir en mots et en anecdotes cet apport, ma pertinence. Je ne sauverai jamais des vies comme le fait un médecin, mais ça ne veut pas dire que je ne sers à rien.


Michal a tout à fait raison ; comme toute expérience de vie, partir sur le terrain nous change. J’arrive déjà à sentir cette transformation. J’imagine seulement à quel point ce sera encore plus tangible quand j’aurai pris un peu de distance par rapport à ce moment de ma vie professionnelle (et personnelle évidemment). Je me rends compte bizarrement que je suis arrivée où je suis, non pas par hasard comme je l’ai longtemps pensé, mais parce que j’étais destinée à aimer ce métier. Les casse-têtes, les découvertes, l’enseignement, l’analyse, questionner les gens, aller chercher des réponses, voyager, chercher la vérité, soupeser les arguments pour arriver à quelque chose de juste, j’ai toujours eu ça en moi. Le terrain c’est la quintessence de toutes ces choses, c’est l’endroit où l’abstrait devient réel, ou les théories se corroborent ou se réfutent, c’est l’endroit où l’humain prend le dessus sur les livres et où le chercheur devient un véritable détective.

Élémentaire mon cher Watson !

Sky of blue, and sea green, in our HMS Gingerline submarine!

Quelques jours avant le départ de Vanessa pour Londres on se parlait sur Skype afin d’organiser sa venue. Comme notre dernière vraie discussion remontait à plusieurs semaines déjà, je lui ai posé quelques questions sur ses cours et son projet de maîtrise. C’est dans ce contexte qu’elle en est venue à me parler des restaurants Pop-Up qui feront l’objet de son mémoire. Elle m’informe qu’elle observera quelques évènements organisés par un groupe à Montréal et m’explique que le concept est né à Londres.

Curieuse et allumée par l’idée, je me suis mis à la recherche d’un groupe londonien qui prévoirait une soirée pendant la période où Vanessa serait en ville. J’ai finalement trouvé, avec un peu d’aide, quelques sites internet. Après avoir envoyé plusieurs courriels, avoir coché « j’aime » sur quelques pages Facebook, je me suis croisé les doigts en espérant que les dates concordent et que je puisse vivre ça, ici, avec mon amie.

Miracle! Gingerline, une de ces organisations préparait un évènement pour la première fin de semaine de mai. Quel bonheur, car pendant ce weekend, non seulement Vanessa était en ville, mais mon amie Stéphanie était de passage chez moi. Par un concours de circonstances particulièrement à mon avantage, ils m’ont confirmé lundi dernier que nous avions trois places pour leur évènement du samedi.

Mais, je ne vous ai toujours pas dit ce qu’est-ce qu’un Pop-Up ? Vanessa vous expliquerait probablement mieux que moi le concept, mais c’est essentiellement des évènements spontanés undergrounds. C’est une vague de restaurants qui sont provisoires et nomades, C’est voulu pour être une expérience culinaire/artistique qui ne dure qu’une soirée.

Les hédonistes informés parcourent Twitter, Facebook et la blogosphère à la recherche de ces dîners généralement annoncés à travers ces réseaux sociaux. Ce sont en partie des pièces de théâtre, en partie des évènements artistiques et en partie une expérience culinaire. Une heure avant l’événement, les organisateurs nous textent l’endroit où il faut se rendre. On ne sait pas où l’on va, ce que nous allons manger, ni même près de qui nous serons assis. Les Pop-Up sont une chance, pour les organisateurs, d'éblouir un auditoire aventureux et ouvert d’esprit à la recherche d’expériences nouvelles. Ça se veut être une sorte de happening qui prend son glamour dans son caractère éphémère, hétérodoxe et alternatif. Que les emplacements soient souvent secrets, parfois spectaculaires et opèrent dans un secteur non règlementaire ajoute au sens de l'aventure culinaire des adeptes de ces soirées.

Gingerline est un Pop-up qui ouvre dans le plus grand secret à des emplacements changeants, mais se trouvant toujours le long de la Eastern Overground Line de Londres (appelée communément “Gingerline” pas les locaux). En collaborant avec une gamme d'artistes, ils réussissent à combiner une bonne cuisine faite maison, la conception d’espace fantastique et la création artistique et gastronomique d’un délicieux menu.


Samedi, on a littéralement mangé dans un sous-marin créé dans le sous-sol d’un atelier d’art qui se trouve dans un genre d’immeuble désaffecté. On a mangé des fruits de mer dans de la vaisselle de bateau, entouré de bruits marins et d’images de scaphandrier. Et on a terminé la soirée sur l’air de « Yellow Submerine » des Beatles.

Quel bonheur de construire des scénarios dans nos têtes pendant les heures précédant la soirée, d’arriver sur place et de ne pas savoir ce qui nous attend ou même avec qui nous allons partagé ce repas. Bien que je savais que mes deux amies allaient très bien s’entendre, le fait qu’elles ne se connaissaient pas d’avance, elles non plus, a aussi contribué au caractère inconnu de notre soirée.
On est donc parti dès la réception du message texte et on s’est dirigé vers l’adresse indiquée par nos mystérieux hôtes. Quand on est arrivé devant l’endroit en question, deux filles habillées comme des pin-up nous ont accueillies, fait signé une décharge (si jamais il nous arrivait quelque chose, ils n’étaient pas responsables!), et quand notre petit groupe s’est avéré assez nombreux, une d’entre elles nous aillant salué de son plus beau « hoy! » nous a fait passé sous la porte de garage entrouverte… et notre aventure a commencé.

Dans une lumière rouge, on s’est faufilé un à un jusqu’à la cage d’escalier qui descendant en colimaçon. Arrivée en bas, une porte de navire nous attendait. Vous savez ces portes avec une écoutille au milieu pour garder l’intérieur des chambres étanches? On a entendu des sons de dépressurisions et la porte s’est ouverte nous donnant accès à la salle de contrôles qui nous servirait de salle à manger. Aux murs des projections photo créaient de véritables hublots d’où l’on pouvait apercevoir le bord de mer et, après notre plongée, les fonds marins. Avant de commencer le souper, quand tout le monde était « on board » on a entendu des bruits de emprésurassions et ensuite on a plongé sous la mer.



On a mangé une entrée de pattes de crabes, une soupe d’artichaut aux escargots, un pâté de poisson (fish pie typiquement anglais) et un dessert à la rhubarbe et au gingembre. C’était excellent!

L’idée géniale c’était cette table unique autour de laquelle tout le monde se présentait et discutait ensemble. Entre les différents services, nos hôtes, tout en restant dans leur personnage de sous-marinier, nous arrivaient avec des trucs pour alimenter la discussion ou allumer la fête. On a reçu des tatous temporaires en ancre de bateau, on a joué aux cartes (trop drôle!), on a chanté… C’était une soirée inoubliable!

Vanessa et Stéphanie ont probablement les photos les plus convaincantes de la soirée dans leur appareil. Alors, pour vous illustré notre aventure, j'ai utilisé quelques images croquées sur le vif par Emli Bendixen, une comparse de l'équipe de Gingerline qui a magnifiquement immortalisé la soirée pour nous. Merci à toute cette équipe extraordinaire!

lundi 9 mai 2011

When what you need is on the other side of the screen … or the ocean


Cette chronique me trotte dans la tête depuis deux semaines. Cependant, on dirait que je n’arrivais pas à l’écrire. Comme si étant donné que j’étais encore dépendante pour un bon moment encore de la technologie, je ne voulais pas faire la critique de ce qui me paraissait, il n’y a pas si longtemps, comme la plus merveilleuse chose du monde. Or, cette semaine, dans ma chambre d’hôtel de Southampton, j’ai lu ma chronique favorite du New York Times et cette phrase a déclenché mon écriture.

« The Internet brings these people together with hash tags and message boards, but it never satisfies them. No matter how much you love someone’s blog or Twitter feed, it isn’t their posts you actually want. »

En janvier, les premières fois que j’ai discuté avec mes parents, mon frère, mes amis grâce à Skype, j’étais épatée d’à quel point c’était tellement mieux que de se donner des nouvelles par téléphone. Voir le visage de l’autre personne, conserver le bonheur du non verbal semblait remplacer presque entièrement la présence de ces gens dans ma vie. L’autre côté de l’océan était devenu l’autre côté de l’écran, tout simplement.

En plus, avec ce blogue, Facebook et les courriels, je réussissais à avoir des interactions quotidiennes, presque instantanées des fois, grâce à ces multiples interfaces de conversation. La nouveauté de mon départ vous motivait à m’écrire; votre curiosité par rapport à ce que je faisais, où j’habitais, comment je m’adaptais, ensemençait nos discussions.

Par magie, quand mon séjour ici a pris un tournant plus normal et routinier, c’est moi qui avais besoin d’avoir de vos nouvelles et de m’immiscer dans votre quotidien. Je me suis mise à vous envoyer des petites pensées que vous retrouviez dans votre boîte de courriel le matin en rentrant au travail ou à vous coller une photo sur votre mur Facebook pour vous décrocher un sourire pendant la journée.

Il y a eu toutes ces nouvelles qui m’ont été annoncées par l’entremise du Web. Ces outils me permettaient d’être avec vous - un peu tout de moins - et de partager vos moments de grands bonheurs et de peine. Je ne vous dirais pas que ce n’était pas difficile des fois de ne pas pouvoir vous prendre dans mes bras, mais j’arrivais à me sentir près de vous malgré la distance.

Mais il y a environ un mois, ma relation à l’écran a changé. Au lieu de focaliser sur la conversation et/ou votre visage souriant, je me suis mise à haïr le moment où je fermais la fenêtre de Skype, le décalage horaire qui vous obligeait à travailler pendant que j’avais l’énergie pour discuter ou à être frustrée par tout ce que je n’arrivais pas à communiquer dans mes courriels aussi longs fussent-ils.

C’est là que je suis arrivée à la conclusion inévitable que la technologie ne remplacera jamais de chaleur humaine, n’arrivera jamais à remplacer une bonne vieille conversation face à face avec les gens que l’on aime. Les silences partagés ne sont-ils pas les plus savoureux?

Je suis chanceuse parce que cette semaine j’ai de la visite. Il y a Vanessa qui est en ville et Stéphanie qui vient passer le weekend. J’aurai l’occasion de discuter des résultats électoraux et d’avoir des nouvelles de l’autre côté… de vous. Mais, malgré tout je sens maintenant l’envie viscérale de vous voir en vrai, de vous toucher, de vous inviter à souper, de rire avec vous et de cogner à votre porte pour aller au marché.

C’est ce nouveau sentiment d’ennui qui me permettra de passer à travers les au revoir déchirants et les dernières promenades dans les rues de cette ville que j’aime inconditionnellement. C’est vous qui serez la motivation dont j’aurai besoin lundi prochain pour fermer la fenêtre, éteindre l’écran et partir vers une autre aventure; celle-là en votre compagnie, l’autre côté de l’océan.

mardi 3 mai 2011

Royal Friday

Mon amour des mariages est de renommée internationale. Et ici, quand je dis que j’aime ça, c’est bien sûr du sarcasme. J’ai toujours trouvé les mariages un peu ennuyants et surtout immanquablement quétaines. Sans réfuter qu’il puisse venir le moment dans la vie d’un couple de vouloir unir officiellement sa destinée et fêter son amour, je reste perplexe par rapport à tout ce qui entoure les mariages ; des incontournables chicanes de famille à la musique de matante. Il y a toujours un petit goût de dragée trop sucrée attaché à ces célébrations, ce qui fait de moi l’antithèse du « wedding crashers ».

Alors, je n’avais pas préparé mon séjour à Londres en conséquence du mariage royal. La preuve c’est que j’étais supposée, à la base, décoller pour Montréal le 18 avril, dix jours avant le jour J. Comme j’ai prolongé mon séjour et que tout le monde en parle depuis que je suis en Grande-Bretagne, je n’avais pas le choix que de me laisser prendre au jeu et de participer à la fête. Je me suis vite rendu compte que les Anglais y étaient aussi insensibles qu’un enfant à l’arrivée de Noël et qu’il y avait quelque chose dans tout ça qui m’échappait vraiment malgré mon statut de sujet de Sa Majesté la reine Elizabeth II.

Ce à quoi je ne m’attendais pas du tout, c’est que cette journée allait devenir une des plus intense et agréable expériences de mon voyage. Sans blague, je me suis fait prendre à l’enthousiasme de la foule, à l’esprit de fête qui régnait aux quatre coins de la ville, au romantisme du moment et à l’histoire de princesse bien sûr. Quoi ?! Vous êtes surpris ?! Bien moi aussi…

On s’était donné rendez-vous avec des amis à 8h30 à la station de tube Hyde Park Corner. Dans mon sac à dos : croissants, mousseux, sandwichs, croustilles, bière, et parapluie (il annonçait de la pluie). Le métro était déjà bondé dès cette heure là. Il faut vous rappeler que c’était férié pour l’occasion, alors aucune autre raison ne justifiait de sortir de son lit à part les épousailles de Will et Kate.

On est entré tranquillement dans le parc et on s’est installé devant les immenses écrans qui présentaient déjà les analyses de la BBC en direct. Entre 8h30 et 11h, plus de 150 000 autres personnes se sont jointes à nous. Tous ont installé leur couverte par terre et ont partagé leurs victuailles en trinquant au mousseux (les plus chics au champagne). Les bouchons sautaient en l’air un peu partout autour de nous et déjà on entendait des applaudissements dans la foule, cela bien avant la première image véritable des mariés ou de leur cortège. C’était déjà magique !

La foule derrière moi à Hyde Park
Dès que les premières voitures ont traversé les grilles de Buckingham Palace, les gens se sont levés d’un bond et se sont mis à applaudir et à brandir leurs drapeaux. À l’arrivée de la Reine sur l’écran, la foule était en liesse pendant que moi je riais de son habit jaune poussin ("Canary Yellow" selon la BBC). Sans surprise, le vrai moment que tout le monde attendait avec impatience était bien sûr la sortie de Catherine et le premier coup d’œil sur sa robe. En attendant, on se demandait à haute voix si William était nerveux. Les gens parlaient de lui comme s’il était leur cousin, leur frère ou leur neveu.

Le souffle coupé, littéralement, on a tous réagi dès qu’on a aperçu la Princesse entrer dans la voiture. Déjà, unanimement, on la trouvait magnifique. N’était-elle pas splendide ?!

Lorsqu’elle a marché dans Westminster Abbey, on a trinqué avec nos voisins de pique-nique, nous à la bouteille, eux avec leurs coupes de plastiques rehaussés par des petits Union Jack autocollants. C’était comme si on avait eu une invitation officielle. Il ne nous manquait qu’un chapeau un peu « too much » et une robe à 3000£.

Pendant la cérémonie, les gens bien préparés ont sorti leur programme et on chanté les psaumes. Je peux vous dire qu’une foule qui chante pendant une messe présentée sur un écran, ça ne peut pas faire autrement que d’émouvoir. C’était beau. Vraiment. Il y avait quelque chose de patriotique et de solennel. Et dès que les mariés se sont dirigés vers les calèches, la fête a commencé en grande trompe.
 
J’ai passé quatre mois à Londres à me demander pourquoi les gens ne se parlaient pas, ne se souriaient pas, à part dans les pubs après une pinte. Là, tout le monde discutait avec leur voisin, se prenait dans leurs bras, s’embrassait même. L’euphorie était palpable, comme si l’amour des mariés s’était propagé à toute la population et que le soleil avait réchauffé leur attitude.

Après le baiser sur le balcon et les avions qui ont passé au dessus de nos têtes, on s’est dirigé, mes amis et moi, vers Edware Road où quelques autres de nos amis participaient à une fête de quartier, un « street party ». On avait tous envie de prendre un verre de bière froide, la canette tablette dans nos sacs à dos avait soudainement perdu de son attrait à la vue d’un pub sympathique. En arrivant là, on est tombé sur une bande de lurons de 7 à 77 ans qui étaient habillés comme pour aller à un mariage royal : les hommes en costard trois-pièces à queue de pingouin et les filles en robe de bal. C’était beau à voir de les regarder danser et festoyer au milieu des décorations de toutes sortes faisant référence à la royauté et à la Grande-Bretagne. On s’est mêlé à eux malgré notre accoutrement peu de circonstance et en deux temps trois mouvements on s’est fondu au groupe comme si on avait toujours été de la gang.

On a bien bu, bien mangé, dansé comme des fous, discuté avec des personnes extraordinaires (le propriétaire du bar entre autres, sa mère, quelques inconnus attirés par hasard comme nous par l’ambiance du lieu) et on a continué à regarder les images du mariage en rediffusion pour la énième fois à la télévision en s’extasiant devant ce conte de fées.

Mes amies Angela et Cathy avec deux inconnues du Pub!
Je n’avais jamais entendu une trame sonore aussi entraînante, assez que chaque chanson nous donnait envie de lever les bras dans les airs et de crier « c’est ma toune ! ». J’avais l’impression pour la première fois que j’assistais à un mariage qui rockait, un mariage comme on aimerait qu’ils le soient tous, un mariage romantique, de toute beauté, agréable, festif et qu’on voudrait qui dure toujours.

Je ne sais pas si c’est un coup de chance que ma journée ait été aussi incroyable, mais je sais que je ne m’attendais pas à ça du tout. Je pensais aller au parc, me taper un bain de foule, rien voir du tout, prendre quelques verres dans un pub de quartier et retourner à la maison en me disant «  been there, done that » et c’est tout. Au contraire, j’ai vécu l’expérience anglaise la plus authentique et amusante depuis mon arrivée et je me suis réconciliée avec les noces.

Et rassurez-vous, vous n’avez pas à avoir 2 millions de téléspectateurs et toutes les personnes les plus riches et célèbres du monde à votre mariage pour que j’y assiste et que j’y prenne plaisir. J’ai compris que le bonheur dans tout ça, c’est de fêter une journée hors de l’ordinaire pour deux personnes exceptionnelles et toutes celles qui les aiment. Mais surtout, que l'occasion était parfaite pour rencontrer des belles personnes et lâché son fou. En d’autres mots, il faut prendre ce moment comme une pause dans nos vies trop chargées et profiter du contexte pour voir nos amis, notre famille, fêter ensemble et souligner une union. Comme disait le Bishop de Londres qui a sacré le mariage du Duc et de la Duchesse de Cambridge (W&K), il faut seulement que je me souvienne que « chaque mariage est un mariage royal ! »


mercredi 27 avril 2011

Des Bières, des Frites, des Chocolats … et une conférence :)

Ça y est, je viens de trouver un autre endroit dans le monde où je m’installerais sans problème. Ce n’est pas seulement à cause des frites divines, de la délicieuse bière et du chocolat. Non, non, j’ai eu le même sentiment en arrivant à Bruxelles cette semaine que celui que j’avais eu en 2005 en retournant à Londres.

J’avais mis les pieds en Belgique en 2004 avec mes parents et mon frère et j’avais adoré visiter la capitale. Cependant, ce n’est pas parce qu’on aime une ville comme touriste qu’on y serait nécessairement bien à long terme. J’ai l’impression qu’il faut y retourner une autre fois pour vraiment sentir le lien qui pourrait exister entre nous et un coin de pays. Bien, c’est confirmé, avec Bruxelles c’est l’amour !

Dernière escapade avant le grand départ d’Europe, je suis partie pour Bruxelles très tôt le matin de mercredi. À mon grand plaisir, j’ai pris le train en direction du continent en considérant ces quatre jours comme un mélange de travail et de vacances. La raison principale de ma visite là-bas c’était la Conférence du réseau international des associations francophones de science politique.

J’étais un peu en manque de science po je dois vous avouer, car faire partie d’un groupe de recherche constitué en grande partie de sociologues et d’anthropologues, ça peut être difficile à long terme. C’était aussi une bonne manière de revoir des collègues européens et d’afficher ma bouille en public pour éviter que les gens ne m’oublient. Il faut que je vous rappelle que je ne participe à aucune conférence cette année et que celle-ci était la seule à laquelle j’assisterai. J’y allais un peu dans l’espoir d’entretenir mon réseau…

Le bâtiment principal de L'ULB
Mais cette douce évasion s’est avérée en être une de plaisir plus qu’autre chose. Pendant son absence, une amie m’a gentiment prêté son appartement, joliment situé entre le centre-ville et l’ULB (Université Libre de Bruxelles) où se tenait la conférence. Cela m’a donné toute la liberté d’aller et venir entre les panels, les repas du congrès et les multiples autres distractions à ma portée.

Dans la journée de mercredi, j’en ai profité pour écouter quelques panels et croiser deux collègues d’Ottawa qui présentaient leur recherche. C’était chouette de voir mon monde en terre étrangère et de constater à quel point les choses avancent vite. Les conférences sont géniales pour cela : elles nous sortent de notre isolement et nous font prendre conscience de l’avancement de notre recherche et du travail des autres. Après avoir croisé des amis de Montréal, des anciens comparses du BAC, quelques collègues européens, je me suis greffé au groupe de panélistes de mes amis Antoine et Amélie pour le repas du soir.

On est allé manger dans un petit resto typiquement belge qui était vraiment super chouette. En plus de bien manger et d’avoir de très agréables conversations avec les membres de cette petite clique, j’ai dégusté mes premières bières du voyage. En remontant la bute du centre-ville vers l’Avenue Louise en fin de soirée, je me suis confessée, hors contexte, de mon bonheur d’être là. Mon exclamation s’est perdue dans les airs, mais ce n’en était pas moins vrai. Je me sens si chanceuse de pouvoir me promener dans tous ces endroits magnifiques.

Le lendemain, la journée a passé comme l’éclair. Quelques panels et plusieurs rencontres fantastiques ont fait passer les heures à un rythme effréné. Je n’ai pas vu le temps passé et rapidement 18h est arrivé et avec elle, Cathy !

Je vous ai déjà parlé de mon amie belge dans une autre de mes chroniques. Nous sommes toutes deux à Londres, mais étant donné que ce weekend c’est Pâques, elle s’adonne à être à Bruxelles. Elle a aimablement accepté de passer la soirée avec moi et de me faire vivre l’expérience bruxelloise par excellence. Premier stop, une bière au Tavernier.

Neuhaus - Chocolatier du Roi
Avec le soleil qu’il faisait, la température qui ne voulait pas dégringoler et mon enthousiasme, c’était le cocktail parfait pour avoir du bon temps sur une terrasse remplie de monde joyeux eux aussi. David, notre ami commun à moi et Cathy, et son mari Alex, se sont joint à nous pour l’apéro et m’ont donné tous les trucs pour faire de mon passage une expérience particulièrement authentique, en commençant par les chocolatiers à fréquenter (c’était Pâques quand même) et les endroits à visiter absolument. Après le premier verre, Alex et David ont dû nous quitter et moi et Cathy avons décidé qu’il était temps de se mettre quelque chose dans le ventre, question de continuer notre tournée. Deuxième stop, une frite sur la place Flagey.


Cervelas
Frites et fricadelle
Nous voilà donc devant un « stand à patate » à nous demander quelle sorte de sauce prendre avec notre frite. Comme la double friture demande un peu plus de patience (ça vaut la peine !), on s’est creusé la panse à regarder le menu et on a finalement décidé de demander un cervelas et une fricadelle à partager. On s’est engouffré le tout en couinant de satisfaction entre les bouchées. Par hasard, David et Alex nous ont aperçus de l’autobus et n’ont pu s’empêcher de nous envoyer un texto pour nous dire à quel point l’image était magique :) Mais bon, après un repas aussi calorique… on se devait de faire descendre le tout. Cathy m’a donc indiqué la rue Lesbroussart. Troisième stop, un verre dans un bar à vin.

Très sympathique endroit, sur la pointe d’un Y, avec des petites tables dehors qui nous ont permis de profiter des dernières lueurs du soleil. C’est à ce moment exact que je me suis dit que j’aimais ma vie. Sérieusement, ma définition du bonheur s’arrête à ça : verre de rouge, bonne compagnie, soleil couchant, terrasse… Voilà ! Épicuriennes à souhait, on est restées là à se demander si le temps pouvait s’arrêter quelques siècles, mais comme c’est impossible, Cathy a sonné le départ. Quatrième stop, le centre-ville.

On a embarqué dans un tram, descendu les quelques artères jusqu’au centre pour se retrouver en deux temps trois mouvements sur la Grand' Place, toujours aussi belle. Un de mes plus beaux souvenirs de voyage appartient à cet endroit. C’était une soirée mémorable passée avec mon frère. On était là à manger des boules de chocolat tout excité qu’une chorale en visite se soit mise à chanter de but en blanc sur la place. Y retourné m’a replongé directement dans mon souvenir et m’a rappelé à quel point mon frère me manque. Mais, nous n’avions pas le temps pour la nostalgie, alors on s’est remis en route. Cinquième stop, une bière dans un jazz-bar.

Rien pour me faire oublier que ça fait trop de mois que je n’ai pas pu rire avec mon frère, mais tout pour me donner un semblant de sa présence. Quoi de mieux que de la bonne musique et une atmosphère embrumée de jazz-bar pour mettre un dièse au goût de la bière. On est resté quelques minutes à s’enivrer des standards et du funk et on s’est remis en route. Sixième stop, la maison.

Mais on s’est enfargé les pieds :) Cathy nous a fait traverser le quartier gai et on est passé devant un de ses bars favoris qui servait encore sur sa terrasse. Les gens étaient beaux à observer, bien habillés et sur la « cruise » solide. On s’est retransformée en chercheuse (Cathy travaille aussi sur les familles et les couples homosexuels)  et on s’est payé un verre pour se fondre à notre objet d’étude. Fascinant ! Bon, bon, mais après un verre s’était bien assez. Direction, septième ciel.

J’ai bien dormi cette nuit-là je peux vous l’assurer. Je me suis réveillée un peu poquée, mais encore capable de me présenter en classe … euh, à la conférence. J’ai écouté les dernières présentations et je me suis sauvée pour dire au revoir à Cathy qui partait avec sa mère dans la région d’où elle vient pour le weekend.
Le tram 94

La dernière journée et demie, je me suis retrouvée seule, comme je l’aime, à arpenter les rues de la ville à la découverte (ou redécouverte) de toutes les beautés de Bruxelles. J’ai vagabondé amplement et je me suis assise ici et là pour prendre un café ou une bière de spécialité… La grosse vie quoi!

 Petite anecdote avant de vous laisser : vendredi soir pour souper, j’ai jeté mon dévolu sur un petit resto que Cathy m’avait recommandé qui était tout près de mon logis. Les serveurs étaient si peinés de me voir assise seule, qu’ils sont venus à tour de rôle me faire la conversation pendant mon repas, assez que je n’ai pas lu une seule ligne du roman que j’avais apportée avec moi. Ils m’ont même payé un verre de bière prétextant que leur patronne était québécoise et que comme j’étais du Québec, ils se devaient de bien m’accueillir. Je vous le dis, je suis en amour !

vendredi 22 avril 2011

A Beautiful Mind


On aurait tous besoin d’une Lucy. Sans blague, je pense que chaque étudiant au doctorat devrait avoir un petit kiosque de psycho-soutien à portée de main. Et pour ajouter à l’impossibilité de mon souhait, il faudrait que cette personne ait passé par le doctorat elle-même. Cette semaine je ne peux faire autrement que de me rendre compte qu’il est impossible d'écrire une thèse quand on a l’esprit brouillé.

Oh! Ne vous en faites pas, je ne suis pas déprimée. Au contraire, ces jours-ci je suis dans ma zone – cela dit, je suis dans cette zone depuis mon arrivée à Londres, exception faite d’une petite semaine de panique totale au mois de mars. À présente date, j’ai presque complété mes entrevues, j’ai des tonnes de documents sous mon bras à rapporter à la maison, je suis en train de rédiger une partie de ma thèse qui me motive vraiment et je suis en Europe ce qui ajoute au plaisir quand même… donc, aucun nuage sous le soleil!

C’est probablement pour ça que je pense à l’importance d’avoir du soutien psychologique pendant la thèse. C’est dans les moments où je vais bien que je me rends compte qu’à d’autres moments je suis dans un sale état. Je m’en rends aussi compte à cette période précise, parce que le printemps, pour les académiques, c’est la saison des conférences, de la fin de session d’hiver et donc, avril-mai est synonyme de stress et d’intensité. Comme je ne participe à aucune conférence cette année (par rapport à 4 l’année dernière!) et que les fins de sessions sont choses du passé depuis que je suis en rédaction, je suis exemptée cette fois de ce sentiment d’urgence. Thank God!

La distance me fait prendre conscience de l’état dans lequel je peux me mettre et dans lequel plusieurs, sinon tous mes collègues et amis se mettent, périodiquement, dans les périodes d’écriture entre autres ou juste avant les conférences ou les dates de tombée. Bon, vous me direz que les doctorants ne font pas exception et que chaque travail amène ses propres périodes de stress. Vous avez entièrement raison! Loin de moi de penser que le milieu académique est plus anxiogène que tout autre milieu de travail, au contraire. Cependant,  je reste convaincue que la position d’étudiant en rédaction de thèse est très spéciale, et à mon avis, cela s’explique par trois choses : la supra-spécialisation de ce que nous faisons, les conditions dans lesquelles on travaille et le processus de rédaction lui-même.

Rendue au doctorat, l’université nous demande de contribuer à notre discipline en abordant un sujet nouveau, en testant des hypothèses inédites ou en poussant nos réflexions théoriques (ou un mélange des trois). Cela fait en sorte que la seule personne qui sait vraiment ce que l’on fait c’est nous; que la seule personne qui a déjà fait cela, c’est nous (quoiqu’on ne l’a pas encore fait réellement); que la seule personne qui s’intéresse aussi passionnément au sujet, c’est nous. L’impact est simple : on se sent isolé.

Même si on a un directeur de thèse, un comité de thèse, des collègues, une communauté de chercheurs qui font tous de la science politique (pour prendre mon exemple), on reste les seuls à saisir réellement ce que notre travail comporte comme défis et comme difficultés. S’il est ardu de partager nos moments de doute et de frustration avec d’autres académiques, vous pouvez vous imaginer qu’il devient de plus en plus difficile d’expliquer à notre famille, nos amis, notre amoureux(se) qu’est-ce qu’on peut bien trouver de marrant à se torde les neurones pour écrire 300 pages qui ne seront lues que par quelques initiés un peu zélés (ou contraints de le faire, a.k.a. notre comité d’évaluation)? Et si on a de la difficulté à justifier notre choix devant ces gens qui nous connaissent le mieux au monde, je peux vous dire qu’il devient encore plus difficile dans les moments de détresse d’appeler à l’aide et d’expliquer pourquoi on sent que tout va s’écrouler uniquement parce qu’on a été incapable d’écrire une seule bonne ligne de la journée.

Je pense aussi que ce sentiment d’isolement est dû énormément aux conditions dans lesquelles on travaille. Trouvez-moi une personne qui est encore à l’école à notre âge (et considérez que je suis un bébé au doctorat!), qui regarde tous ses amis avoir des enfants, se marier, devenir propriétaire, s’installer dans une ville sans se demander où il se retrouvera dans un an et demandez-lui s’il est zen. Ne vous méprenez pas, je pense que d’être prof à l’Université est le plus beau métier du monde… mais la route pour s’y rendre est pleine de nids de poules « Montreal-style » et notre véhicule de transport s’apparente à une Lada une place 1952.

On peut parler argent aussi. C’est ma bibitte noire à moi ça! J’haïs être dépendante financièrement encore à 28 ans, que mon salaire ne soit pas considéré par les banques parce qu’il provient essentiellement d’une bourse, que mes voyages de conférence sont généralement à mes frais personnels, que je ne sache jamais plus de quelques mois d’avance si j’aurai assez d’argent pour payer mon loyer (merci aux bourses qui évitent ce questionnement pendant un certain temps), etc., etc., etc. Je pourrais vous parler longuement des conditions financières d’un étudiant au doctorat, mais je n’en ai pas envie. Je vais plutôt vous parler de l’instabilité qui nous fait tanguer dans les derniers miles de la rédaction.

Pour vous donner un exemple concret, si je réussis à terminer ma thèse dans la prochaine année et que tout va bien, j’ai deux choix après coup : soit je me trouve un poste dans une Université (très peu probable à court terme), soit je fais un postdoctorat (1 ou 2 ans). Pour ceux qui se demandent, un postdoctorant c’est l’équivalent d’un chargé de cours, mais en recherche. C’est un contrat temporaire qui nous permet de publier un peu et d’acquérir de l’expérience supplémentaire afin de nous aider à mousser notre candidature lors des processus d’embauche. Or, ces deux options demandent que je sois mobile, que je considère partir m’installer ailleurs pendant quelques années, sinon pour le restant de ma carrière. Dans mon cas, ça peut paraître assez peu stressant, étant donné que je n’ai rien qui me rattache spécialement à Montréal à part ma famille et mes amis, mais essayez de penser à mes collègues qui ont des conjoints  (qui ont eux aussi des aspirations professionnelles et personnelles) et/ou pire, des enfants (en garde partagée!)…

C’est merveilleux d’avoir un emploi qui nous permette de voyager, mais ce travail nous oblige aussi à être super flexibles géographiquement. Ces décisions sont incroyablement angoissantes et lourdes de conséquences lorsque l’on implique d’autres personnes à l’équation. Et la pression constante de ne pas savoir où l’on sera l’année prochaine rend tout projet d’avenir vraiment laborieux à concrétiser, à planifier et même à rêver. Mon voyage à Londres est stimulant et tout, mais il est temporaire. La prochaine destination est peut-être définitive, alors la décision est encore plus importante et épeurante, je dois dire.

Cependant, je n’ai pas tant le choix de prendre ce qui passera et c’est probablement cela qui rend la chose si difficile à gérer. Les postes dans les Universités sont peu nombreux et plus la ville dans lesquels ils sont basés est intéressante (Montréal, Toronto, Vancouver par exemple) plus la compétition est féroce. Pour ce qui est des postdoctorats, c’est plus facile de trouver un endroit chouette - comme le processus ressemble un peu à mon séjour à Londres en plus long c’est assez attirant - mais le statut temporaire de ces positions nous remmène nécessairement à la case départ quelques mois plus tard.

Mais réellement, je crois que ce qui rend la rédaction de thèse un processus vraiment pesant, c’est que s'en est un de création. Avec toute période de création vient une volonté de performance, un souci de la perfection et le sentiment qu’on y arrivera jamais. On est soumis plus que jamais à la critique (la nôtre et celle de nos pairs) et plus que jamais, on ne fait qu’un avec notre travail. Tout devient donc personnel. On se doit d’être humble, de constater nos limites sans trop broncher, de s’astreindre à un régime sec de fête et de vie sociale. Nécessairement cela s’accompagne de découragements fréquents et d’incertitudes constantes.

Encore une fois, être soumis à la critique ou à l’évaluation de notre travail n’est pas exceptionnel au travail de doctorant. Je vous dirais que par rapport à tout autre travail ce qui fait exception, c’est que nous n’avons pas été acceptés comme potentiellement compétent : nous n’avons pas notre diplôme et donc, nous n’avons pas le bénéfice du doute. Je vous jure que tous nos professeurs se demandent à un moment ou à un autre si on ne va pas laisser tomber soit notre doctorat, soit l’académie. Et cette probabilité d’abandon nous demande d’être toujours plus convaincant, à chaque étape, malgré qu’à l’intérieur on ne l’a jamais moins été.

À certains moments, on ne peut pas vraiment expliquer pourquoi, mais on a l’impression que la vie au complet est en train de foutre le camp. Il n’y a rien qui aille mal en soi, mais rien ne fonctionne vraiment. On remet systématiquement en question notre compétence, notre choix académique et on appréhende l’avenir... et tout le reste y passe: chum, blonde, amis, famille, appart, name it!

Vous avez sûrement déjà entendu un auteur ou un artiste dire qu’il doit faire le ménage, rayer tout sur sa « to-do list » avant de pouvoir se mettre à écrire ou à composer. Bien, le problème vient de là. On doit avoir les pensées libres de tout le reste pour créer. Souvent, ce qui se passe, c’est qu’on s’était mis un objectif et qu’on ne l’atteint pas pour de multiples raisons : un autre projet est arrivé; on a sous-estimé le travail à faire; on est préoccupé par un truc personnel et on arrive pas à écrire; on a reçu de la rétroaction sur une version de notre travail et on se trouve poche; on a eu une mauvaise rencontre avec un collègue ou notre directeur et ça nous sape le moral, etc.

Avec les amis de BIOS on appelle cet état de rédaction le « dark side ». Croyez-moi, vous ne connaissez pas votre ami futur Ph.D. tant et aussi longtemps que vous n’avez pas vu son « dark side »; c’est comme une protubérance académique, un alien mental.

Je ne changerais pas mon choix de carrière pour tout l’or du monde et j’espère du plus profond de mon cœur pouvoir un jour être professeure dans une Université quelconque (partout sauf à Thunder Bay), mais je troquerais bien quelques structures universitaires contre la stabilité de la plupart des autres emplois. Comme ce n’est pas possible, la seule chose à faire est de se bâtir un système de soutien. Un groupe de gens qui s’assureront qu’on ait l’esprit clair et les pensées alignées pour rédiger.

Ça commence par une famille/conjoint qui écoute, tente de comprendre, s’intéresse, questionne. Ce sont des amis qui te tirent de devant ton ordinateur, te sortent de ta tête et qui te font rire. C’est un directeur de thèse qui t’offre son temps quand il perçoit que tu as besoin d’aide et qui te connaît assez pour te confronter dans ton travail sans heurter ton cœur. C’est une Université qui s’arrange pour ne pas te laisser seul avec tes problèmes d’argent, qui s’organise pour que tu puisses t’insérer dans une communauté de chercheurs qui t’aidera à contrer l’isolement. Mais je pense aussi que dans le meilleur des mondes on aurait accès à un psychologue personnel qui, à long terme, nous aiderait à démêler les nœuds et entreprendrait de nous rappeler que ce que l’on fait ce n’est pas extraordinaire, mais ce n’est pas commun non plus.

J’écris ces lignes et je pense à une amie de ma mère qui a accueilli deux ou trois amis en fin de rédaction de thèse chez elle. Tous étaient dans cette panique existentielle. Ils se sont réfugiés chez elle et ont trouvé « the safest place to write ». Elle a un courage de bœuf, parce que je peux vous dire que je me jetterais moi-même à la poubelle quand je suis dans cet état là. Mais, par un hasard incroyable, elle a compris ses amis et a décidé de contribuer à sa manière à leur travail, à leur vie. Elle est une de ces personnes extraordinaires qui nous permettent de survivre à cette période de notre vie. Parce que la thèse, ça ne dure pas toujours, ce n’est pas tout, ce n’est pas notre vie. Il faut souvent se le rappeler, se le faire rappeler.

Ce sont ces gens merveilleux que l’on remercie au début de notre thèse. Avant d’écrire mon mémoire de maîtrise, je ne m’étais jamais vraiment attardée aux remerciements dans les bouquins que je lisais. Maintenant, j’aime parcourir ces quelques paragraphes en essayant de m’imaginer comment toutes les personnes citées ont pu participer sans vraiment le savoir à ce que je vais trouver entre ces pages. À bien y penser, les personnes les plus intelligentes, dont le travail est remarquable, sont les gens qui ont été assez brillants pour s’entourer des bonnes personnes.

Perhaps it is good to have a beautiful mind, but an even greater gift is to discover a beautiful heart. 
- A Beautiful Mind, The movie

vendredi 15 avril 2011

Sunny side up!

J’ai passé trois mois et demi in Foggy London Town, alors je peux vous dire que lorsque le soleil a commencé à se pointer le nez j’ai eu la même réaction que mes compatriotes anglais : j’ai eu peur ! Je vous jure, autant que le soleil est un concept complètement abstrait pendant les mois d’hiver, autant quand il se montre enfin, les Londoniens restent perplexes et presque embarrassés. Non, mais, pensez-y… on a vécu pendant des semaines sans lumière et sans chaleur, on a cohabité avec la pluie, son humidité et son vent sournois, et là il faut se réhabituer à plisser le nez, à enlever les pelures d’oignon et à s’asseoir sur les bancs de parc (que l’on croyait être installés là pour tromper les touristes).

Oh vous croyiez vous aussi que c’était un cliché de dire que Londres est une ville pluvieuse et grise ?! Bien, je vous l’assure maintenant, c’est tout à fait vrai. Cependant, elle n’est pas moins belle ou moins attrayante pour autant la Capitale britannique. Je vous avoue même qu’elle est vraiment jolie, cette ville, dans la grisaille de l’après-midi avec les réverbères et la fine pluie qui tombe. On se prend à regarder les édifices et à se demander s’ils ont été construits en conséquence du climat, sachant qu’ils seraient plus charmants sous une couche de brume et qu’ils seraient appréciés par des quidams cachés sous des parapluies (expliquant la quasi-absence des gratte-ciels dans le Square Mile).
Cela dit, je me suis plainte plus d’une fois du manque de lumière. J’en étais même un peu déprimée à la fin du mois de février. Pendant que vous, vous vous tapiez ces froids de canard qui apportent avec eux le soleil magnifique de l’hiver, j’étais sous la pluie à regretter (quelquefois, mais quand même pas souvent) la neige, le ski et les rayons qui nous réchauffent dans les remonte-pentes.

Mais tout d’un coup, sans avertir, comme ça sans crier gare, l’été est arrivé. On est littéralement passé du perpétuel mois de novembre aux journées parfaites de juin. Les soirées sont très fraiches, mais sérieusement, le jour on se croirait en plein été. C’est génial !

Avec cette température frôlant les 25 degrés au zénith du jour, vient toutes ces choses qui nous rendent fous quand on a passé à travers les mois d’hiver : les terrasses, les fleurs, les sorties au grand air, les pique-niques, les chaussures portées sans bas, les jours qui rallongent et les promenades du soir qui viennent avec…


Je ne me rappelle pas si je vous ai raconté que l’endroit où j’habite est rempli d’oiseaux de toutes sortes. Comme je ne suis pas loin de Hampstead Heath, le grand parc qui est au nord de Londres (j’en avais parlé ici), la faune dans mon quartier est assez incroyable. En plus de mon ami le renard (dont je vous ai parlé ici), il y a ces tonnes d’oiseaux qui viennent chanter à ma fenêtre. Et avec le soleil, est arrivé le temps d’ouvrir les fenêtres et d’écouter les sons de l’extérieur.

À Montréal, dans mon appartement de Villeray, cette étape cruciale annonçant l’arrivée de l’été, concorde souvent avec la fête des Mères et donc, avec l’odeur de bacon émanant de l’Oeufrier le dimanche matriarcal venu. Ici, cette étape est aussi arrivée avec la fête des Mères (Britannique, soit le 8 avril), mais a plutôt apporté avec elle le chant des pies (Magpie en anglais). « Être bavard comme une pie », c’est une expression très à propos je peux vous le confirmer. C’est assez sympathique de les entendre jaser à toute heure du jour et de la nuit :)

Mais ce qui est le plus frappant avec la réapparition du beau temps, c’est à quel point Londres est différente, à quel point je redécouvre totalement mon environnement et les endroits qui me semblaient familiers. Premièrement, les gens sont souriants. C’est presque bizarre de dire cela, mais je crois que le mauvais temps rend les gens mornes à la longue. Avec ces belles journées, les Anglais se sont transformés en « nice blokes » se lançant des farces et des compliments en l’air sans raison. Les hommes et les femmes recommencent à se parler décemment et à se sourire en entrant dans l’ascenseur. Quel changement d’ambiance !

Deuxièmement, Londres est maintenant remplie de fleurs. Les pommiers et les cerisiers arborent respectivement leur belle couleur rose et blanche, et abondent d’une odeur fantastique. Les parterres nous offrent leurs tulipes multicolores (je crois que c’est pour elles que j’aime autant le printemps, elles sont si belles !) et les rues, parcs et autres endroits publics raisonnent enfin des sons d’enfants qui jouent frénétiquement.


Je devais lire plusieurs textes dimanche dernier question de me garder à flot dans le travail qui pullule en ces dernières semaines ici. Mon amie Angela a eu la brillante idée de m’inciter à aller m’installer à Kensington Garden afin de joindre l’utile à l’agréable. Je me suis donc préparé un lunch, prit la couverture sur mon lit et je suis allée m’acheter des bières en chemin. Rendue là-bas, j’ai passé la journée à lire, à écouter de la musique, à rêvasser et à regarder les gens vivre tout en faisant autant de photosynthèse que possible.

C’est là que je me suis rendu compte à quel point nous avons tous besoin de faire diminuer le taux de mélatonine dans notre corps à ce moment de l’année. Le parc n’était pas seulement bondé, mais les gens y étaient complètement hystériques. Les uns jouant au soccer torse nu et les autres essayant de retenir leurs enfants d’aller se saucer dans le bassin encore un peu brun vert. Les familles, les amis, les solitaires comme moi, tout le monde étaient réunis sous le soleil aux quatre coins de Londres.

Angela est venue me rejoindre un peu plus tard et on a partagé ma bière en discutant travail sans même s’en rendre compte, comme si ce sujet de conversation devenait soudainement plus léger dans l’air chaud. Mon amie portugaise a attaché nonchalamment un foulard autour de sa tête, a mis ses grosses lunettes « à la Bardot » et s’est étendue comme si c’était un don inné que de savoir s’offrir au soleil. J’en étais presque jalouse, découvrant ainsi que notre côté latin (a.k.a. aimer avoir du plaisir et toucher les gens) s’arrête où notre côté anglais commence.

Vous savez ce que je me suis payé en chemin vers la maison ? Une crème à glace ! Un bon cornet de crème glacée au chocolat pour me récompenser d’avoir lu et annoté les six textes qui gisaient depuis trop longtemps sur mon bureau et d’être assez intelligente pour savoir repousser les murs de mon bureau au-delà des allées briquetées de LSE.


En espérant donc que ces dix jours fabuleux décident de se reproduire. J’adorerais, moi, que mon dernier mois soit baigné de lumière et de cette ambiance de fête estivale. Bon, si j’en crois ce que mes collègues m’ont dit, c’était ça l’été… ces dix jours-là, that’s it that’s all !

Comme je ne suis pas encore devenue cynique et négative comme eux (ayant vécu beaucoup moins longtemps ici qu’eux), je reste convaincue que Dame Nature va me gracier d’une météo exemplaire afin que je puisse revenir avec toutes ces belles images, odeurs et autres merveilles avec moi à Montréal. Et comme ma relation avec la grande Dame, vous le savez déjà, est assez exceptionnelle, je ne peux que rester fidèle à mon positivisme et garder espoir !